De quel chantier s’agit-il?
Au départ, il y a le projet de réhabilitation d’une parcelle classée ICPE (voir géorisques) rue Marcel Paul à La Rochelle, en plein centre-ville. Il s’y trouvait une ancienne usine à gaz par distillation de la houille, exploitée de 1840 à 1961. Cela explique la présence d’hydrocarbures, naphtalène et cyanure dans l’air et le sol.
Cette parcelle appartenant à Engie a été rachetée par Speed Rehab (filiale Brownfields gestion et Vinci Immobilier) en vue d’une reconversion via un programme immobilier comprenant 6 bâtiments destinés au logement collectif et une résidence étudiante.
Or, cette parcelle est bordée par le groupe scolaire privé Fénelon (de la maternelle au lycée – 2000 élèves) et l’école publique Massiou (GS de maternelle et élémentaire – 120 élèves).
Dès le mois de février, l’association Robin des Bois alertait sur le danger de ce chantier.

Un chantier qui provoque de fortes nuisances
La destruction de plusieurs bâtiments sur la parcelle a débuté courant juin, puis la dépollution du site a commencé aux alentours de la rentrée scolaire. Puis la découverte de cuves de goudron début septembre a entraîné les premières nuisances odorantes.
À la suite d’une réunion avec le groupe scolaire Fénelon, il a été décidé que les travaux sur ces zones les plus odorantes seraient réalisés soit le mercredi après-midi, soit reportés pendant les vacances de la Toussaint. Mais le chantier a pris du retard et a continué au-delà des vacances, provoquant alors de fortes nuisances olfactives, entraînant des maux de tête, nausées, diarrhées, vomissements, irritations oculaires, malaises, allant même jusqu’à la fermeture de l’établissement privé pendant 3 jours.
L’école élémentaire Massiou a également subi ces fortes odeurs d’hydrocarbures, qui plus est sur de jeunes enfants. Cela a poussé de nombreux parents à ne pas emmener leur enfant à l’école le vendredi 8 novembre.
Le plus grave, c’est que nous n’avons appris l’existence de ce chantier qu’avec l’apparition de ces nuisances. À aucun moment nous n’avons été informés en amont de l’existence et la potentielle toxicité de ce chantier.

Toutes ces nuisances ont fini par provoquer une réunion à la préfecture le mercredi 13 novembre, réunissant la DREAL, l’ARS, le centre antipoison de Bordeaux, la mairie, le maître d’ouvrage (Brownfields), les chefs d’établissements et les représentants des parents d’élèves.
Il semble que pour la préfecture et le maître d’ouvrage les émanations que nous avons subies ne sont pas un manquement à l’arrêté préfectoral qui encadre la dépollution, la seule chose importante étant « d’aller vite » pour évacuer la pollution. Lorsque nous avons posé la question au maître d’ouvrage « pourquoi ne pas avoir interrompu le chantier à la fin des vacances de la Toussaint, avec le retour des élèves? » , il nous a été répondu que « les déchets étaient ouverts » et qu’il fallait donc aller vite pour les évacuer. Nous avons ensuite demandé la raison pour laquelle les établissements scolaires n’en avaient pas été informés, il nous a été répondu que l’information avait été transmise à la préfecture.
Certes, les seuils d’alerte de l’AP n’ont pas été dépassés (les mesures sont réalisées par le maître d’ouvrage lui-même), mais le nombre de personnes présentant des symptômes d’intoxication aurait dû suffire à alerter les instances publiques.
La mairie qui jusque-là avait été rassurante et silencieuse, se déchargeant sur la préfecture, a pris conscience au cours de la réunion de la gravité de l’incident.
Finalement, le chantier a été mis en pause le jeudi 14 novembre.
Qui est concerné ?
Qui sont les principales personnes concernées par les émanations toxiques du chantier ?
À ce jour, environ 250 élèves ont présenté des symptômes tels que des céphalées, des irritations des yeux et/ou des voies respiratoires. Ces données ont été transmises à l’ARS pour analyse. Voici, à notre connaissance et sur la base des réponses à notre questionnaire en ligne, la liste actuelle des principales personnes concernées par les émanations toxiques :
1. Élèves, enseignants et personnels scolaires des établissements scolaires suivants :
- Collège Fénelon Notre-Dame (pôle 3/4 et pôle 5/6)
- Lycée Fénelon Notre-Dame
- École primaire Massiou (GS au CM2)
- École primaire Fénelon Notre-Dame (CP au CM2)
- École maternelle Fénelon Notre-Dame (PS à GS)
2. Riverains du quartier
3. Commerçants et artisans du quartier

Une inquiétude qui persiste
Aujourd’hui, la dépollution est à l’arrêt, mais il reste 1 semaine de travail pour terminer cette phase, sans compter le terrassement. La cour de récréation de l’école Massiou, séparée de la parcelle polluée par un simple mur, est interdite, les enfants vont jouer provisoirement dans le parc, plus loin du chantier, mis à disposition par la mairie. Les élèves sont de retour à Fénelon mais les symptômes persistent malgré l’arrêt du chantier. Des « pollutions concentrées » restent stockées sur place, et la terre à nu permet l’infiltration d’eau de pluie, qui risque de contaminer la nappe phréatique.
Nous sommes très inquiets pour la suite du chantier. D’autant plus que, seules les pollutions concentrées vont être évacuées (la terre de surface), la terre restante restera très polluée ce qui impose les restrictions d’usages précisées dans l’arrêté préfectoral :
- la restriction à un usage résidentiel à durée limitée (5 ans) du bâtiment réhabilité destiné à accueillir une résidence étudiante
- l’interdiction de jardins potagers et d’arbres fruitiers/ à baies en pleine terre ;
- le recouvrement des terres pouvant être en contact avec les résidents et/ou les travailleurs par des matériaux d’apport sains externes au site, sur une épaisseur minimale de 0,3 m constatée après compactage
Le chantier de construction devrait durer 2 ans et remuer de la terre très polluée. Les mesures de prévention seront-elles aussi faibles que pour la dépollution ? Les élèves de Fénelon, de Massiou, et les riverains seront-ils contraints de s’adapter au chantier, et non l’inverse, comme l’on pourrait s’y attendre dans un territoire qui se veut exemplaire sur le plan environnemental ? Nous considérons qu’il y a eu un grand manque de communication de la part de la préfecture, et un manque de vigilance de la part de la mairie.
Les acteurs du chantier
Quels sont les principaux acteurs institutionnels et privés identifiés dans la gestion du chantier ?
Dans cette situation exceptionnelle, nous avons répertorié plusieurs institutions et acteurs clés. L’objectif est de rendre l’information accessible, claire et transparente, afin de permettre à chacun de s’orienter facilement dans ce contexte complexe.
Acteurs institutionnels :
- Mairie de La Rochelle
- Préfecture de Charente-Maritime
- DREAL (Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement)
- ARS Nouvelle-Aquitaine (Agence régionale de Santé)
- DASEN (Direction académique des services de l’Éducation nationale)
- Rectorat de Poitiers
- Directions des établissements scolaires Fénelon Notre-Dame et Massiou
Acteurs privés liés au projet immobilier et au chantier :
- Brownfield (investisseur immobilier)
- Speed Rehab (société en charge de la dépollution)
- VINCI (promoteur immobilier)